Misère.

Voilà bien longtemps que ma plume ne vomit plus ses blessures sur cette virtuelle mais ô combien accueillante esplanade.

J'aime bien commencer mes plaintes avec une intro grandiloquente. Ça donne l'air intelligent.

Le "régime sportif" commencé en janvier a porté ses fruits. Je sais à présent qu'il est efficace. Par malheur, ou mauvais timing, je me suis découragée. Pendant les vacances, c'était facile de faire du sport, et puis je me sentais tellement mal qu'il fallait que je réagisse. Mais je me suis lassée, comme je me lasse de tout.

J'ai beaucoup minci, je crois bien avoir perdu un tour de taille. Je rentrais mieux dans mes culottes, mes shorts, mes pantalons, même mes pieds semblaient plus petits.

Et au début, ça allait mieux. Je n'osais presque pas en croire mes yeux.

Je réussissais.

Et puis l'école a repris. Je m'activais beaucoup, marchais énormément, sortais, bougeais, allais à des concerts, des campings, et j'étais tout temps sur la route, à faire l'aller-retour entre un road trip et une soirée.

Et puis, j'ai recommencé à manger. De la merde, hein, évidemment, sinon c'est pas drôle.

Quand j'ai vu que je reprenais un peu, qu'il fallait reprendre le contrôle, j'ai recommencé à me faire vomir. Beaucoup. Beaucoup trop. Et de la mauvaise façon.

La journée, je me relâchais totalement : c'est ça qui m'a perdu. Je mangeais, je recommençais à stagner, j'abusais de choses néfastes pour moi (que ce soit la nourriture ou autre). Bref, j'ai repris de mauvaises habitudes, que je n'avais pas entièrement laissé tomber, mais qui m'atteignais moins, étant donné le sport que je faisais.

Ne jamais arrêter. Jamais. Même quand on a la flemme. Jamais.

Après avoir (trop) mangé (et pas que) dans la journée, je culpabilisais le soir, en rentrant chez moi. Avec la fatigue en plus, je n'étais qu'une larve immonde et affamée. Du coup, quoi ? Eh bien, rien. Je mangeais beaucoup le soir aussi, et je n'avais pas toujours l'occasion de tout rejeter.

J'ai repris du poids, donc. Forcément.

Bon, j'admets que je n'ai pas tant repris que ça. Je n'ai pas un regard assez objectif sur moi, j'ai tendance à voir tout en noir de ce coté là. Donc ça va encore, je ne suis pas redevenue grosse, mais il faut que je fasse attention. Vraiment très, très attention.

Le sport, en ce moment, c'est difficile. Je finis tard, les devoirs, contrôles et autres corvées me fatiguent de plus en plus, et j'ai plein d'autres préoccupations.

En plus, il y a eu... l'incident.

Un soir, j'avais mangé comme une ogresse, et j'avais pris un rythme assez régulier depuis quelques jours : je m'empiffrais devant ma mère, j'allais prendre ma douche et hop ! Ni vu ni connu, les aliments néfastes allaient rejoindre leurs amis les rats dans les canalisations obscures de l'immeuble où j'habite. Sauf que, justement, ces canalisations, je ne suis pas toute seule à les utiliser. La suite n'est pas dure à deviner : la baignoire s'est bouchée. Elle m'avait déjà fait le coup, deux ou trois fois, mais j'avais toujours réussi à m'en tirer; Au bout de 20 minutes où je faisais semblant de me laver les cheveux, la masse répugnante de mon rejet (si j'puis dire) s'écoulait toute seule. Je rinçais, et tout était nickel.

Mais pas cette fois. J'ai passé bien deux heures à essayer de vider, de cacher, de jeter etc., etc... rien à faire. Et puis, cerise sur le vomi, ma mère est entrée dans la salle de bain.

J'étais foutue.

Maintenant, et ce depuis environ une semaine, elle me surveille. Inutile de dire que je ne peux absolument plus utiliser le prétexte de la douche. Du coup, j'ai trouvé un autre moyen.

Je ne mange plus de la journée. Mes amis ne s'inquiètent pas, de toute façon : ils savent qu'ils n'ont rien à dire, et puis bon, des fois je prends du pain à la cantine, et je reste joyeuse, disponible. Je change souvent de sujet quand on parle de nourriture, d'ailleurs. Nonobstant, ils ne se permettent pas de me faire quelque réflexion à propos de ma façon de me nourrir : je suis libre de mes choix. Cela me convient très bien.

Le plus difficile, c'est le soir, quand je rentre. Épuisée, morte de faim, quelque peu lasse. Je ne peux jamais m'empêcher totalement de manger. Mais progressivement, je réduis. Il m'est difficile de me débarrasser de cette habitude que j'ai pris le soir : je mangeais beaucoup, parce que je savais que de toute façon, tout allait disparaître dans les méandres des canalisations mentionnées plus haut. Maintenant, lesdites canalisations me sont fermées.

Mais j'ai toujours aussi faim.

C'est très dur. En plus, maintenant, depuis la leçon de morale que m'a faite ma mère, je culpabilise encore plus qu'avant. Oui, je sais que j'ai un problème. Oui, c'est une maladie. Oui, je sais que c'est mal. Oui, je sais que ma santé va en pâtir.

OUI.

Allez donc demander à un cleptomane d'arrêter de voler.

Faites de même avec un oiseau.

Vous verrez bien.

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